L'Attachement , film français de Carine Tardieu, sorti en 2024
Analyse critique[]
Sandra, cinquantenaire célibataire, tient une librairie féministe. Lorsque le couple de l'appartement voisin, Alex et Cécile, doit se rendre à l'hôpital pour l'accouchement de cette dernière, Sandra accepte de s'occuper de leur fils Elliott, âgé de six ans, et issu d'un premier mariage de Cécile. Des complications surviennent lors de l'accouchement et la mère décède en donnant naissance à une fille prénommée Lucille. Par la suite, Sandra devient de plus en plus une référence féminine importante, non seulement pour le garçon, mais aussi pour le père veuf et pour la petite Lucille.
À partir de ces douleurs, de ces chagrins, de ces manques, tout ne sera qu’attachement, liens maladroitement recomposés mais choisis.Le père veuf et perdu voit son quotidien entièrement voué à un nourrisson et un fils qui n’est pas le sien. La voisine Sandra devient centrale dans leur vie et comprend, sur le tard, combien la dépendance affective peut être douce. De merveilleux personnages secondaires, la grand-mère, le vrai papa d’Elliot, la mère de Sandra, et une nouvelle amoureuse d’Alex, tentent, eux aussi, à leur manière, de reconstruire du bonheur sur du deuil.
Carine Tardieu développe son propos avec une grâce dépourvue de guimauve. Cette chronique de la reconstruction affective où l’amour se confond avec l’amitié, et voisine avec la peur de se tromper, de blesser, est un entrelacs lumineux d’instants simples et cruciaux, un petit garçon glisse un dessin sous la porte de cette voisine consolatrice, devenue une nouvelle mère d’élection ; une femme se déguise en sapin de Noël pour se fondre dans le décor d’un veuf qui n’est pas encore prêt à aimer de nouveau ; le père et le beau père, dans une cuisine, décident, avec sagesse, du meilleur avenir possible pour un fils qu’ils ont en commun ; une rupture s’annonce dans un aéroport à cause d’une compote pour bébé.
Le film déjoue les attentes romantiques du spectateur. A l’instar des personnages, on ne sait pas où on va, ni que faire de toute cette affection qui circule, et qui ne se laisse jamais solidifier en catégories préétablies (amour, amitié), le film navigue toujours en deçà, dans cet entre-deux où le sentiment ignore encore ce qu’il est. Seule vaut l’extrême précision du scénario, qui cherche à ne tromper personne. Dans une remarquable dextérité scénaristique, Carine Tardieu parvient à développer une polyphonie d’affects et de personnages où, dans ce grand flou des sentiments, chacun essaye de ne flouer personne.
Distribution[]
- Valeria Bruni-Tedeschi : Sandra Ferney
- Pio Marmaï : Alexandre « Alex » Perthuis
- Vimala Pons : Emillia Demetriu, la pédiatre
- Raphaël Quenard : David, le père biologique d'Elliott
- César Botti : Elliott
- Catherine Mouchet : Fanny, la mère de Cécile
- Marie-Christine Barrault : la mère de Sandra et Marianne
Fiche technique[]
- Réalisation : Carine Tardieu
- Scénario : Carine Tardieu, Agnès Feuvre, Raphaële Moussafir, d'après le roman L'Intimité d'Alice Ferney paru en 2020
- Musique : Éric Slabiak
- Photographie : Elin Kirschfink, Yann Maritaud
- Montage : Christel Dewynter
- Sociétés de production : Karé Productions, France 2 Cinéma, uMedia, en association avec 6 SOFICA
- Durée : 106 minutes
- Dates de sortie : 3 septembre 2024 (Mostra de Venise)
- France : 19 février 2025