Le vent se lève ( japonais 風立ちぬ, Kaze tachinu) film d’animation japonais réalisé par Hayao Miyazaki et sorti au Japon en 2013
Synopsis détaillé[]
Le film est une biographie d'un ingénieur en aéronautique, librement inspirée de la vie de Jirō Horikoshi, le concepteur des chasseurs bombardiers japonais Mitsubishi A6M, appelés « Chasseurs Zéro ». L'univers mis en scène est moins onirique et plus réaliste que dans la plupart des productions précédentes de Miyazaki. Lors de la présentation du film à la Mostra de Venise où il est en compétition pour le Lion d'or, Koji Hoshino, le président du studio Ghibli, annonce que Le vent se lève sera le dernier film d'Hayao Miyazaki qui prend sa retraite du cinéma.
Une nuit, un jeune garçon, Jirô Horikoshi, rêve qu'il pilote un prototype d'avion aux ailes d'oiseau ; son rêve se termine en cauchemar lorsqu'il est attaqué par un énorme bombardier. Jirô s'éveille et entame une journée ordinaire dans le Japon de 1918, où il grandit en compagnie de sa famille. Jirô est un jeune garçon travailleur, épris de justice et surtout passionné d'aéronautique. Il collectionne avidement les revues d'aéronautique étrangères qu'il lit en anglais, langue qu'il est en train d'apprendre. Le soir venu, il s'allonge sur le toit de sa maison pour contempler les étoiles et regarder au loin, espérant ainsi soigner ses problèmes de vue qui risquent de l'empêcher de devenir pilote. Il rêve de Caproni, ingénieur italien ayant conçu de somptueux modèles d'avions. Jirô est rejoint par sa jeune sœur Kayo, qui montre des étoiles filantes à son frère, que ce dernier ne distingue pas à cause de sa mauvaise vue.
Devenu un jeune homme, Jirô étudie l’ingénierie aéronautique à l'université impériale de Tokyo. Dans un train, alors qu'il prend l'air sur la plate-forme arrière d'une voiture, son chapeau s'envole et est rattrapé par une belle jeune fille. Lorsqu'elle lui restitue l'objet, elle prononce en français un vers d'un poème du Français Paul Valéry, Le Cimetière marin, récemment paru : « Le vent se lève... » Jirô complète aussitôt : « ...il faut tenter de vivre ! » Intrigué, Jirô regagne son compartiment, mais le train déraille sous l'effet d'un fort séisme (le séisme de 1923 de Kantô). Ayant survécu à la catastrophe, Jirô aide la jeune fille et sa gouvernante à regagner leur maison à Tokyo, puis part sans pouvoir leur donner son nom ni leur demander les leurs. Jirô se rend alors à l'université où les étudiants tentent de sauver les livres menacés par l'incendie qui s'est déclaré dans la ville ; le vent menace de propager le feu dans tout Tokyo. Rentré chez lui, Jirô se rend compte qu'il est amoureux de la jeune fille, mais, lorsqu'il a le temps de rechercher sa maison, il ne découvre plus que des ruines.
Deux ans après, alors qu'il se trouve à l'université, Jirô reçoit un colis de la part de la famille de la jeune fille ; il bondit à la poursuite de la personne qui l'a apporté, mais ne parvient pas à la retrouver. De retour chez lui, il discute avec Kayo qui lui reproche de négliger les siens. Kayo dit vouloir s'orienter vers des études de médecine, chose nouvelle pour une femme à l'époque ; elle obtient de Jirô qu'il l'aide à convaincre leur père. De son côté, Jirô part travailler pour Mitsubishi à Nagoya.
À Nagoya, Jirô retrouve un ami étudiant, Honjô. Leur supérieur, Kurokawa, confie à Jirô la conception des plans d'une pièce de l'aile d'un nouveau modèle d'avion de chasse à la suite d'un appel d'offres de l'aéronavale. Jirô travaille d'arrache-pied avec le matériel précis qu'il a apporté de Tokyo et imagine des plans audacieux. Quelque temps après, en visitant les hangars où sont construits les avions, Honjô et Jirô se rendent compte que la pièce a déjà été conçue et que ce premier travail n'était qu'un moyen pour Kurokawa de mettre à l'épreuve les compétences de sa nouvelle recrue. Impressionné par les plans, Kurokawa garde Jirô. Mais une fois le prototype réalisé, le vol d'essai est un échec et l'aéronavale choisit un concurrent. En rentrant chez lui, Jirô aperçoit trois enfants affamés et leur offre des gâteaux, mais ils s'enfuient ; il raconte l'anecdote à Honjô qui ironise sur son caractère chevaleresque en lui rappelant que les coûts énormes des recherches auxquelles ils s'adonnent pourraient assurer l'alimentation de beaucoup de Japonais pauvres.
Mitsubishi s'oriente vers la conception de bombardiers et collabore avec l'entreprise allemande Junkers. Honjô et Jirô sont alors envoyés en voyage d'étude en Allemagne. Là, ils sont impressionnés par la supériorité technique de l'aviation allemande mais rebutés par la morgue qu'affichent leurs partenaires allemands. Sur le chemin du retour à l'hôtel, ils assistent à une inquiétante course-poursuite entre un homme et des militaires, sans en comprendre les tenants et les aboutissants. Jirô est devenu un travailleur acharné qui néglige sa santé ; Honjô, plus pragmatique, prend soin de lui comme un frère. Tous deux rêvent de concevoir un modèle d'avion capable de combler le retard du Japon en matière d'aviation. Jirô rêve à nouveau de Caproni, qui lui explique sa vision de l'aéronautique : les avions sont des inventions magnifiques mais au destin funeste puisqu'elles peuvent être utilisées comme des armes dévastatrices. Caproni préfère concevoir des avions civils, mais il annonce à Jirô qu'il va prendre sa retraite, car, selon lui, un ingénieur ne dispose que de dix ans de vie créative ; Jirô, lui, commence seulement les siennes et Caproni lui souhaite bon courage.
Quelques années plus tard, Jirô, de retour au Japon, travaille sur un nouveau modèle d'avion de chasse, dont le vol d'essai est un échec. Épuisé, Jirô peut partir se reposer quelque temps dans une auberge. Un après-midi, pendant une promenade, il rattrape le parasol envolé d'une jeune femme qui peint sur une colline voisine et le remet au père de l'inconnue. Le lendemain, Jirô rencontre la jeune fille dans un bois et tous deux se reconnaissent : ils s'étaient déjà rencontrés dans le train au moment du séisme. La jeune fille se nomme Nahoko Satomi et tous deux sont manifestement amoureux. Au soir, tandis que Jirô guette l'arrivée de Nahoko, il est abordé par l'homme au long nez, un Allemand aimable et cultivé nommé Castorp. Pendant la discussion, Castorp s'inquiète de l'expansionnisme nazi qui risque de déboucher sur une guerre. Le père de Nahoko arrive alors et apprend à Jirô que Nahoko est malade et n'a pas pu paraître ce soir-là. Quelque temps après, Jirô revoit Nahoko à son balcon et tous deux s'amusent avec un avion en papier conçu par Jirô. Jirô finit par demander la main de Nahoko à son père ; tous deux acceptent, mais Nahoko prévient Jirô qu'elle est atteinte de la tuberculose et ne l'épousera qu'une fois guérie.
Jirô poursuit son travail sur son nouvel avion. Mais la police secrète s'intéresse à lui et Kurokawa l'aide à s'éloigner quelque temps. Un jour, Kurokawa transmet à Jirô un télégramme urgent : Nahoko a craché du sang et va très mal. Jirô prend le premier train toutes affaires cessantes pour aller au chevet de Nahoko, mais doit repartir le soir même. Nahoko part se reposer dans un sanatorium isolé dans la montagne, bien décidée à guérir. Mais l'éloignement la pèse et elle décide finalement de rejoindre Jirô pour l'épouser, vivre avec lui et le soutenir dans son travail. Jirô et Nahoko demandent alors à Kurokawa et à son épouse de les marier ; d'abord réticent, Kurokawa, fléchi par son épouse, accepte et la cérémonie a lieu. Jirô se replonge ensuite dans son travail et vit une période heureuse avec Nahoko, qui occupe ses loisirs à se promener et à peindre. Mais l'état de santé de cette dernière s'aggrave peu à peu.
Kayo, devenue interne en médecine, comprend que Nahoko se met en danger et en fait reproche à Jirô, suggérant que Nahoko retourne dans un sanatorium pour se faire soigner, mais les époux ne supportent pas l'idée de vivre séparés. Grâce au soutien de Nahoko, Jirô termine enfin la conception de son nouvel avion et part quelques jours assister au vol d'essai. Pendant ce temps, Nahoko, qui attend une visite de Kayo, annonce qu'elle part se promener ; le bus qui amène Kayo la croise sur la route. Kayo découvre en arrivant que Nahoko a laissé plusieurs lettres, où elle explique qu'elle repart pour le sanatorium. Elle comprend alors que l'état de santé de Nahoko est désespéré et qu'elle a préféré s'isoler pour mourir, afin de ne laisser que de bons souvenirs à Jirô. Dans le même temps, le vol d'essai du nouvel avion de Jirô est un succès retentissant, mais l'ingénieur est saisi par la certitude que Nahoko est morte et ne partage pas l'enthousiasme général.
Ensuite, les escadrilles des chasseurs japonais conçus par Jirô s'envolent dans le ciel pour bombarder des civils. Quelques années plus tard, Jirô se retrouve dans une plaine jonchée de carcasses d'avions et y aperçoit Caproni. Jirô lui avoue être hanté par la culpabilité des massacres causés par les avions qu'il a inventés et dont aucun n'est revenu. Caproni lui montre un ciel immense constellé d'avions de différents types : ceux conçus par Jirô montent rejoindre les autres. Caproni affirme que Jirô peut être fier de ses avions et lui conseille de penser à ce qu'il a de plus cher. Nahoko apparaît alors dans le lointain et propose à Jirô de vivre sa vie. En larmes, Jirô murmure : « Merci ! Merci ! » puis s'éloigne pour rejoindre Caproni.
Analyse critique[]
Miyazaki, s'est largement écarté de l'intrigue de son manga d'origine, et choisit de s'inspirer du roman Le Vent se lève de Tatsuo Hori, roman autobiographique où Hori décrit sa relation avec son épouse malade de la tuberculose, pour l'amour entre Jirô et Nahoko. Cette relation amoureuse est un élément entièrement fictif tandis que le parcours professionnel de Jirô reste à peu près fidèle à la réalité historique. Miyazaki fait cet ajout afin que le film ne soit pas entièrement centré sur la conception d'un avion de guerre, mais aborde plus largement les rêves et les sentiments de Jirô et la façon dont on tente de vivre pleinement dans une époque de guerre. Miyazaki indique s'être également inspiré des films japonais en noir et blanc comme ceux de Yasujirô Ozu et Mikio Naruse qui montraient les conditions très dures dans lesquelles évoluait la société japonaise d’avant-guerre.
Hayao Miyazaki s'aventure hors du conte, son territoire de prédilection, et loin de son bestiaire favori, créatures merveilleuses et autres demi-dieux fantasques. La seule « apparition », ici, est celle du concepteur d'avion Gianni Caproni, géant à moustaches qui hante l'imagination de Jiro. Les scènes oniriques, en plein ciel, d'une gaieté gamine, éclatante contrastent avec le réalisme d'un récit très adulte. Sous toutes les belles couleurs, le bleu limpide des nues, le vert frémissant des arbres, se cache une réalité mélancolique qui hante aussi bien la grande histoire que la petite , celle personnelle du héros.
Le vent se lève, titre, emprunté au poème Le Cimetière marin, de Paul Valéry, résume toute l'ambivalence du film, une menace et un élan. Le cinéaste en fait le fil rouge d'une réflexion sur le passé de son pays, sur les souffrances, les épreuves et les compromissions de tout un peuple. Miyazaki ne fait pas un film dossier. Il joue plus subtilement les dénonciateurs, par petites touches, au gré d'une conversation avec un voyageur antinazi, ou le temps d'une scène de cauchemar, où le héros, hébété, erre dans le chaos rouillé d'un cimetière d'avions.
Le film fait la couverture du numéro de janvier 2014 des Cahiers du cinéma, c'est la première fois qu'un film d'animation est en couverture de la revue fondée en 1951. En fin d'année, le mensuel le placera parmi ses 1 meilleurs films de 2014. Quatorze pages sont consacrées au film, dont une critique élogieuse de Jean-Philippe Tessé. Il insiste sur la noirceur du film, placé à ses yeux intégralement sous le signe de la catastrophe et de l’aveuglement, principalement l'aveuglement de Jirô qui « ne voit le mal nulle part » et « semble laisser le soin aux autres d’écrire l’Histoire tant lui doit s’absorber dans la tâche de concevoir de nouveaux modèles » ; il est également sensible à la portée autobiographique du Vent se lève, rappelant que le père de Hayao Miyazaki dirigeait une entreprise au service de l'armée impériale et que sa mère était tuberculeuse.
Au Japon et dans les pays voisins, le sujet du film a fait l'objet d'une importante polémique, amplifiée par les prises de position pacifistes de Miyazaki. Ce dernier avait en effet signé quelques jours avant la sortie du film, dans le mensuel Neppu, une publication du studio Ghibli, une tribune de 28 pages intitulée Modifier la Constitution est insultant. De plus, dans Le vent se lève, l'ingénieur Jirō Horikoshi, passionné d'aviation, est intéressé par le fait de concevoir de « beaux avions » et non des appareils à utiliser pendant la guerre. De nombreux Japonais ont ainsi reproché à Miyazaki son anti-nationalisme et son refus de réviser la constitution proposé par le premier ministre japonais Shinzō Abe, notamment concernant l'article 9 de la constitution japonaise qui fait renoncer le Japon à son droit de déclarer la guerre ou à utiliser sa force militaire comme moyen de règlement des différends internationaux.
À l'inverse, de nombreuses critiques se sont élevées dans les pays voisins ayant souffert lors de la guerre contre le Japon ou étant en conflit territoriaux avec eux, notamment en Corée du Sud et en Chine, où certains reprochent au réalisateur de faire l'apologie de la guerre. Un autre élément du film, sans rapport avec la guerre, a fait débat au Japon : le nombre de scènes où l'on voit les personnages fumer. Deux scènes en particulier, une où le personnage de Honjô demande une cigarette à Jirō alors qu'ils sont encore au lycée et une autre où Jirō fume à côté de Nahoko alors qu'elle est gravement malade, ont provoqué la colère de l'association japonaise de lutte contre le tabac qui a demandé que la diffusion du film soit interrompue du fait de la mauvaise influence qu'il pouvait avoir sur les jeunes spectateurs.
Fiche technique[]
- Titre original : 風立ちぬ (Kaze tachinu)
- Réalisation : Hayao Miyazaki
- Scénario : Hayao Miyazaki
- Musique : Joe Hisaishi , il s'agit de la dixième collaboration entre le réalisateur et le compositeur.
- Photographie : Atsushi Okui
- Direction artistique : Yōji Takeshi
- Montage : Takeshi Seyama
- Producteur : Toshio Suzuki
- Société de production : studio Ghibli
- Durée : 126 minutes
- Dates de sortie 20 juillet 2013
- France : 22 janvier 2014
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